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Classe inversée, classe renversée

26 juillet 2024


Quand l’élève « prend la place » de l’enseignant
Les élèves n’apprennent pas tous de la même manière et au même rythme et pourtant, tous devront maîtriser les connaissances et les compétences du socle commun. Face à cet enjeu, il n’existe pas une « recette pédagogique » unique qui s’imposerait à tous les enseignants, pour tous les âges des élèves et quelle que soit la discipline enseignée. 

Derrière la notion d’innovation pédagogique, on trouve donc une multiplicité de pratiques et de dispositifs pertinents pour répondre à l’hétérogénéité dans les classes. Différentes pratiques pédagogiques innovantes utilisant les ressources numériques se déploient et ce, de la maternelle à l’université afin de valoriser un apprentissage plus actif des élèves. Avec le COVID, l’approche s’est un peu plus diffusée. L’Atelier STABILO fait le point sur deux d’entre elles : la classe inversée et la classe renversée. Ces méthodes pédagogiques ne s’opposent pas aux pratiques traditionnelles (car elles ne sont pas toujours adéquates selon les publics ou les sujets) mais elles invitent les enseignants à enrichir leur rôle pédagogique.

La pédagogie inversée

C’est quoi la pédagogie inversée ?

Inverser, c’est changer la position de deux éléments. Dans le cas de la pédagogie inversée, on va donc échanger les temps pour la théorie et la pratique. La théorie, que dans la méthode traditionnelle l’enseignant présente en classe à ses élèves, est ici découverte à la maison ou au CDI, grâce aux moyens que le professeur met à leur disposition par le biais de ressources numériques ou papier.

La pratique (les exercices) qui était auparavant réalisée seule à la maison (avec difficulté si le cours n’était pas compris et si les parents ne sont pas en capacité d’aider leur enfant) est réalisée en classe, avec leur professeur pour guide. L’élève est ainsi stimulé dans son activité cognitive et réflexive. On favorise la mise en pratique des savoirs : le plus important, comme se l’accordent à dire certains pédagogues tels que Montaigne, Rousseau ou Benjamin Franklin qui pourtant ne connaissaient ni la classe inversée ni les ressources numériques.

Puisque le cours se fait à distance, seul ou en petit groupe, les ressources numériques telles que des vidéos, articles en ligne avec ou sans QCM associés, sont importantes dans cette pédagogie. Autre exemple de ressource numérique : les enseignants enregistrent leurs voix sur leur cours pour en faire une vidéo. Grâce à des logiciels gratuits, c’est assez facile et si cela paraît trop technique, les professeurs s’organisent en groupe de travail collaboratif, le plus doué aidant les autres !

Une pédagogie active, créative et interactive… mais ce n’est pas non plus une recette miracle. Il n’existe pas de recherches qui permettraient de savoir si la classe inversée possède vraiment, en matière de réussite scolaire, les vertus que leur prêtent leurs partisans mais elle suscite un enthousiasme évident chez ceux qui l’ont testée ! Les élèves sont eux aussi enthousiastes et tous les enseignants s’accordent à dire que les élèves développent leur autonomie, que la méthode aide à grandir, à travailler en équipe, à agir, discuter, être acteur des apprentissages.

Quels sont les bémols de la pédagogie inversée ?

Il y en a. Tout d’abord, l’enseignant doit lui aussi inverser le rôle qu’il joue et ce n’est pas si simple : le temps de la classe n’est plus consacré à la transmission de contenus et à la correction d’exercices mais à la résolution, en commun, de problématiques. Tous peuvent ne pas avoir compris le cours à la maison et les sollicitations ne cessent pas. Une journée de cours inversé vous laisse sur les rotules… Surtout si vous avez une classe de plus de 25 élèves, de niveau différent… 

Ensuite, les outils utilisés en dehors de la classe doivent être ludiques et stimulants, les jeunes générations étant assez exigeantes en la matière et les enseignants n’étant pas forcément des professionnels du montage vidéo. Par ailleurs, on peut se demander si la classe inversée n’est pas à contre-courant quand les enseignants évitent de plus en plus de donner des devoirs... Les élèves qui ne travaillaient pas à la maison leur exercice ne travailleront sans doute pas plus la théorie. Il faut donc contrôler que les élèves ont fait le travail demandé et qu’ils l’ont compris. Pour contrer ces deux problèmes, nombre d’enseignants essaient d’inverser la classe au CDI ou en salle informatique… voire en classe. Auquel cas, les apprentissages se font à distance… du professeur. Des enseignants ont, par exemple, essayé de faire visionner les vidéos sur les téléphones portables alors que d’autres élèves réalisaient en parallèle des exercices en plan de travail (des exercices par palier)… et ça marche ! 

Enfin, tous les thèmes du programme ne sont pas adaptés à cette méthodologie pédagogique

Pour conclure, tous s’accordent à le dire : le rôle de l’enseignant est encore plus essentiel que dans la méthode traditionnelle…

La pédagogie renversée

C’est quoi la pédagogie renversée ?

Si la classe inversée échange les temps pour la théorie et la pratique, la classe renversée, elle, change le sens de marche. On va modifier le cheminement du savoir, qui ne s’exerce plus de l’enseignant vers l’élève mais de l’élève vers l’enseignant ! Mais oui : aux élèves de construire le cours grâce aux ressources mises à disposition, à l’enseignant de les guider, en faisant émerger le questionnement, en faisant le lien entre les différentes informations. L’enseignant fait l’élève : il n’a pas compris et se fait réexpliquer la notion. Ne dit-on pas que ce qui se conçoit bien s’exprime clairement ? La classe aussi est renversée, les élèves « tapissent les classes d’un savoir construit par eux-mêmes » : la classe en disposition classe n’existe plus, place aux affiches, aux paperboards. Le schéma du professeur sur l’estrade est lui aussi renversé ! Pour aller plus loin, certains enseignants demandent aussi à leurs élèves de concevoir les évaluations !

Prenons un exemple. Après avoir trouvé de concert la problématique en classe, les élèves vont, par petits groupes, aborder une partie du sujet. Chaque équipe dispose d’un plan d’action pour cette séance de 2h30 qui présente le déroulement de la séance, les objectifs, la restitution attendue et les ressources à disposition. Les groupes préparent donc en autonomie, une partie de la leçon. Ils passent ensuite au tableau, s’installent au poste informatique de l’enseignant et proposent l’analyse d’un document projeté suivi d’un court texte explicatif, avec dates et notions importantes à retenir et que le reste de la classe va prendre en note. L’enseignant a pu guider les élèves mais ce sont eux qui ont cherché, réfléchi et créé ensemble. On peut aussi leur demander de préparer les questions de l’évaluation et même de corriger leurs pairs !

À noter : on peut renverser une classe de primaire ! Amener deux ou trois élèves au bureau, pour une lecture de texte, suivis de questionnements réalisés par les enfants, c’est… enthousiasmant pour eux. Et pour l’enseignant !

On ne gagne pas à tous les coups mais les résultats sont étonnants. On voit ainsi les élèves en difficulté qui souhaitent ajouter de la complexité aux exercices ou même veulent ajouter des petits pièges dans les évaluations. Le plus doué en recherche complètera celui qui s’exprime le mieux à l’oral… comme dans une petite entreprise, les compétences se complètent. À noter, ceux qui ont le plus de difficultés à s’approprier la méthode sont souvent… les habituels premiers de la classe et a contrario, les moins « scolaires » deviennent parfois brillants !

Quels sont les bémols de la pédagogie renversée ?

Les bémols sont pourtant, là encore, bien présents : il faut d’abord oser bousculer ses habitudes et ce n’est pas facile. Comme dans la classe inversée, c’est la fin du « silence, on écoute le prof » remplacée par le bruit pédagogique ! Faire visionner plusieurs séances vidéos de concert et laisser place aux échanges entre élèves porte le niveau sonore à un point important et épuisant mais indispensable. C’est aussi, comme pour la classe inversée, un gros travail de préparation pour l’enseignant et la classe renversée ne peut pas s’adapter, non plus, tout le temps et à tous les sujets.

Adorée par les élèves, c’est clairement une méthode innovante particulièrement intéressante dans les matières scientifiques et de sciences humaines. Elle rencontre un grand succès, en particulier, dans les lycées professionnels et centres de formation d’apprentis où les méthodes traditionnelles ont besoin d’être bousculées pour remotiver les élèves…

Méthode classique, inversée ou renversée ?

Que ce soit en méthode classique, inversée ou renversée, il va de soi que l’enseignant reste le garant des apprentissages au travers du dispositif qu’il va construire. En effet, les cours à distance 100 % numériques, c’est-à-dire sans professeur présent, avec seulement des vidéos et des QCM, c’est difficile pour les élèves . Pouvoir poser des questions, aller plus loin avec son enseignant et des camarades de classe… autant d’interactivités humaines essentielles que le numérique ne comble pas. 

Alors ? Ces innovations ne sont pas des recettes magiques qui permettraient de régler tous les problèmes d’apprentissages mais utilisées en complément des méthodes traditionnelles, elles permettent de pratiquer une pédagogie qui ne soit pas que descendante et qui permette aux élèves d’être acteurs de leurs apprentissages. Prêts pour partir à la renverse ?